Apprenez à créer une « histoire culinaire » simple et puissante

Costas MillasMacro08 sept. 202510 min read
Nikon magazine

Costas Millas, metteur en scène et photographe culinaire primé, partage sa recette pour créer une collection d’images connectées en combinant la composition, l’éclairage et la couleur.

Le désir de donner vie à une idée du début à la fin et de raconter une histoire a été façonné par mon parcours en design graphique et en direction artistique. En tant que passionné de cuisine, je prenais souvent des photos de mes plats et les partageais sur les réseaux sociaux. Quelques années plus tard, j’ai troqué mon téléphone contre un appareil photo Nikon (d’abord le Zfc, puis le Z6III) et j’ai travaillé avec Fortnum & Mason, Waitrose ou encore Fratelli Beretta ; j’ai été publié par Clean Eating Magazine et j’ai remporté des prix aux British Photography Awards et aux World Food Photography Awards.

Les histoires culinaires sont un excellent moyen de stimuler votre créativité et de développer vos compétences en matière de mise en scène et de photographie. Voyons comment vous pouvez créer la vôtre.

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Food Photography

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Que contient mon sac photo ?

À gauche : « Find Your Way to Me », 70 mm, 1/8 s, f/16, 200 ISO. Au milieu : « Arrest (after Bridget Riley) », 110 mm, 1/8 s, f/11, 100 ISO. À gauche : « Getting to Know You », 145 mm, 1/15 s, f/16, 200 ISO ©Costas Millas

Qu’est-ce qu’une histoire d’art culinaire ?

Une histoire d’art culinaire est un ensemble d’images créées autour d’un thème central, avec une idée et une palette cohérentes pour toute la collection. Les images peuvent être narratives, illustrant par exemple le processus de préparation d’une recette particulière, des ingrédients bruts au plat final, ou être plus conceptuelles, avec des idées liées par la couleur et un concept créatif global, comme dans Spaghetti.

Pour cette histoire, je voulais prendre un petit groupe d’ingrédients, des spaghettis frais, des boulettes de viande et de la sauce tomate, et créer des images qui les présentent individuellement et ensemble d’une manière nouvelle, inattendue et créative. J’aime présenter les aliments de manière artistique, en utilisant la couleur, la lumière et mon appareil photo pour donner vie aux idées.

Le processus

J’aime laisser se développer un début d’idée dans mon esprit, mais je commence toujours par rassembler d’autres éléments visuels de référence qui m’inspirent. Je garde un dossier sur mon Instagram et sur mon ordinateur portable. Il peut s’agir d’une œuvre d’art (l’artiste britannique Bridget Riley a été une grande source d’inspiration pour Spaghetti), d’une autre photo culinaire dont j’ai aimé la composition ou l’éclairage, d’une idée de recette ou même simplement d’une combinaison de couleurs. Au fur et à mesure que je rassemble des éléments de référence et que je réfléchis à l’histoire globale, j’esquisse des idées et je trouve des concepts, voire des titres, qui pourraient inspirer l’œuvre dans son ensemble.

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Créer une histoire culinaire : sélection de l’arrière-plan et tableau d’inspiration

Chaque projet repose souvent sur l’envie de repousser ma créativité et d’expérimenter avec de nouveaux équipements. Avant de commencer à travailler sur Spaghetti, j’avais récemment acheté une nouvelle lumière continue (Godox UL150), qui était bien plus puissante que tout ce que j’avais utilisé auparavant, et j’étais impatient de travailler avec des effets de lumière plus prononcés et des ombres marquées.

Souvent, mes histoires ont des palettes de couleurs distinctes qui leur permettent de s’harmoniser et de se démarquer. J’ai été attiré par le jaune pâle, mais chaud des pâtes et le rouge riche et profond des boulettes de viande et de la sauce. J’ai donc cherché un cadre qui me permettrait de donner vie à tout cela. En commençant à explorer des idées audacieuses et graphiques, j’ai ajouté un fond carrelé noir à ma palette pour apporter encore plus de contraste et d’intérêt.

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L’intérieur du studio de Costas

Une fois le concept, la palette et les idées réunis, j’utilise mes croquis pour établir une liste de prises de vue et réfléchir au déroulement des opérations pour donner vie à l’ensemble. Par exemple, avec Spaghetti, j’ai créé tous les concepts inspirés de l’art avec les brins de spaghetti ensemble avant de passer à ceux qui combinaient les boulettes de viande, la sauce et les pâtes. De cette manière, j’ai pu être aussi productif que possible et éviter de préparer trop de nourriture au fur et à mesure.

Pour moi, une histoire forte ne se résume pas à une palette cohérente et à des idées captivantes, elle repose aussi sur la manière dont toutes les images sont retouchées. Déterminer un style clair pour l’aspect final des images est essentiel, non seulement pour qu’elles reflètent mon style personnel, mais aussi pour qu’elles s’intègrent dans un ensemble cohérent. Mon style est graphique, audacieux et coloré, et je veille à accentuer les textures et les couleurs lors de mes retouches avec Adobe Lightroom. Pour Spaghetti, il s’agissait de renforcer les rouges, de veiller à ce que les spaghettis aient un aspect lisse et que la sauce semble onctueuse et délicieuse. L’ensemble du concept doit être percutant et attirer l’attention, et les retouches devaient aller en ce sens. Si les retouches finales avaient été plus atténuées et douces, les images n’auraient pas eu le même impact global.

La séance photo

Toute l’histoire de Spaghetti a été photographiée à l’aide de l’équipement suivant :

Sélection de la lumière

Maîtriser mon nouvel éclairage a été un élément clé de ce projet, notamment en expérimentant avec la lumière contrastée et les ombres graphiques. J’ai utilisé un grand diffuseur avec ma lumière, jouant avec la distance qui sépare la lumière de la surface du diffuseur et observant le rendu des ombres. Plus la lumière était proche du diffuseur, plus les ombres étaient prononcées et graphiques. Pour quelques images du récit, par exemple « Gonna Getcha », qui présente un jeu d’ombres amusant montrant une fourchette menaçante sur le point de frapper sa modeste proie, une boulette de viande, j’ai utilisé ma lampe découverte sans diffusion de lumière.

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« Gonna Getcha ». Zfc + NIKKOR Z DX 50-250mm f/4.5-6.3 VR, 60 mm, 1/15 s, f/10, 160 ISO ©Costas Millas

Il est important de trouver le bon équilibre entre les effets de lumière, l’idée et la composition. Contrairement à l’image ci-dessus, où les ombres font partie intégrante de l’idée et de la composition, certaines des compositions plus conceptuelles en vue plongeante, comme mon concept de labyrinthe de pâtes « Find Your Way to Me » et mon concept de panier tressé « Put All Your Pasta in One Basket », nécessitaient une lumière plus douce pour ne pas éclipser (littéralement) l’idée.

Spaghetti a également été éclairé entièrement avec une configuration à lumière unique, et le plus important était de m’assurer que je façonnais la lumière tout au long de la prise de vue pour obtenir les effets souhaités, non seulement grâce au diffuseur, mais aussi en masquant et en saturant la lumière. Dans la plupart des scènes sombres tournées avec le carrelage noir en fond, j’utilisais des cartes verticales pour bloquer la lumière et créer des ombres plus dramatiques qui saisissaient les idées les plus cinématographiques, comme « 5-Second Rule » et « Greedy with a Chance of Meatballs ». Vous verrez dans ces images les ombres claires et foncées intentionnelles et les lignes directrices qui aident à guider l’œil de l’observateur et à rendre l’image plus saisissante.

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À gauche : « 5-Second Rule », 50 mm, 1/8 s, f/10, 100 ISO. À droite : « Greedy with a Chance of Meatballs », 55 mm, 1/30 s, f/8.0, 125 ISO ©Costas Millas
Le matériel

Toute la séance photo a été réalisée avec l’un de mes zooms préférés, le NIKKOR Z DX 50-250mm f/4.5-6.3 VR, car c’était pour moi un excellent objectif de départ, abordable, et permettant de saisir des styles d’images très variés. Comme la focale minimale est de 50 mm, il est essentiel de maintenir une bonne distance entre l’appareil photo et le sujet, c’est pourquoi je finissais souvent par poser mon trépied sur ma table de travail !

Réglages de l’appareil photo

J’ai maintenu l’ouverture à f/11 et f/16 pour mes vues plongeantes, afin que tout soit net. Pour les prises de vue directes où les aliments se détachent de l’arrière-plan et créent un effet bokeh, j’utilisais une ouverture plus grande, par exemple de f/5.6 à f/8.

Comme je photographiais des sujets statiques avec un trépied et une lumière continue plutôt qu’avec un flash, j’ai maintenu une sensibilité faible (entre 100 et 200 ISO) et une vitesse d’obturation comprise entre 1/8 et 1/30 s.

Pour certaines images, comme « Finger Food » et « Me, Myself and I », où j’étais moi-même dans l’image et où je devais travailler rapidement pour mettre en scène les pâtes dans ma main et dans ma bouche, j’ai modifié mes réglages pour permettre d’inévitables mouvements subtils, 1/250 s et 640 ISO et 1/125 s et 640 ISO, respectivement. J’ai également utilisé un retardateur de 10 secondes pour pouvoir me mettre en position. Il a fallu plusieurs tentatives pour obtenir une prise de vue nette ! Mais cela faisait partie du plaisir et du processus global de jeu et d’expérimentation.

À gauche : « Me, Myself and I », 135 mm, 1/125 s, f/8, 650 ISO. Au milieu : « There’s Been a Mix Up », 160 mm, 1/8 s, f/10, 100 ISO. « Hats off », 105 mm, 1/30 s, f/5.6, 100 ISO. À droite : « Finger Food », 50 mm, 1/250 s, f/7.1, 640 ISO, ©Costas Millas

Un défi pour vous

Créer une histoire culinaire est un excellent projet qui vous amènera à réfléchir à de nombreux aspects de la photographie : composition, éclairage, couleur, mise en scène, retouches, etc. Pourquoi ne pas essayer de réfléchir à un sujet, une recette, une palette de couleurs ou un concept qui pourraient inspirer une série distincte d’images ?

Commencez par étudier différents ingrédients, sortez de votre zone de confort et rendez-vous à une exposition ou visitez un nouvel endroit ou un marché qui pourrait faire naître une idée. Commencez à rassembler des images de référence de choses que vous avez vues ou collectées. Comment se connectent-elles entre elles ? Notez vos idées ou allez jusqu’à en dessiner quelques-unes pour vous aider à établir votre liste de prises de vue.

De combien de façons différentes pouvez-vous saisir un même sujet ? Une histoire relie-t-elle les images ou sont-elles connectées par la couleur et l’éclairage ?

Pourriez-vous proposer au moins six manières de présenter un seul sujet sous forme d’histoire ?

À gauche : « Put All Your Pasta in One Basket », 120 mm, 1/15 s, f/11, 100 ISO. Au milieu : « Bursting with Flavour », 50 mm, 1/125 s, f/5.6, 200 ISO. « Current (after Bridget Riley) », 200 mm, 1/8 s, f/11, 100 ISO. À droite : « Plain Jane », 210 mm, 1/15 s, f/16, 100 ISO ©Costas Millas

Quelques conseils pratiques
  1. Prenez le temps de faire des recherches et de trouver des idées.
  2. Aucune idée n’est mauvaise. Notez-les au fur et à mesure qu’elles se développent.
  3. Réfléchissez bien au fil conducteur de votre histoire et laissez-le vous guider tout au long du processus d’idéation, de la séance photo et des retouches.
  4. Pensez dès le départ à l’ambiance que vous voulez créer et laissez-la guider et orienter votre manière d’éclairer et de retoucher vos images pour transmettre vos intentions.
  5. Ne vous focalisez pas trop sur l’équipement et sur le fait de ne pas avoir « tout le matériel nécessaire ». Spaghetti a été photographié à l’aide d’un Nikon Zfc et d’un (excellent !) zoom. Exploitez au mieux ce que vous avez et tirez le meilleur parti de votre équipement. Parfois, les limitations peuvent vous inciter à penser de manière encore plus créative.
  6. Utilisez un trépied pour obtenir des images claires et nettes.
  7. Recourez à un zoom pour expérimenter différentes focales.
  8. Établissez une liste de prises de vue, mais utilisez-la comme guide tout en expérimentant et en vous amusant. Parfois, la meilleure image vient d’un nouvel angle que vous ne voyez qu’une fois les aliments en place ou lorsque vous finalisez une prise de vue pour préparer la suivante !
  9. Veillez à accorder une attention particulière à la façon dont vous façonnez la lumière et à la retouche des images après la prise de vue, afin que toutes les images de votre histoire donnent l’impression de faire partie d’un ensemble cohérent.
  10. Amusez-vous !

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